Est-ce nécessaire de réaliser une étude posturale pour faire du vélo de route?
Devenu tendance, l’étude posturale est un sujet de plus en plus abordé dans la presse spécialisés (blogs et papier) mais beaucoup de cyclistes se demandent si le coût est justifié et si cela est vraiment utile pour un cycliste amateur.
Les différentes approches d’une étude posturale
Aujourd’hui, l’offre d’étude posturale est variée et accessible, propulsée par les différentes marques de vélo et équipementier, en partie associée avec leurs gammes de produits (Specialized avec « Rethül Fit », TREK avec le « Trek Precision Fit », Shimano et le Shimano Bikefitting ; Giant avec le « Giant RRS (Right Ride System) » Etc…).
Ces systèmes sont le plus souvent accompagnés d’une analyse 3D effectuée par des caméras, et des logiciels qui permettent d’analyser les mouvements du cycliste de façon dynamique à la fois sur des vélos de « fitting » mais aussi sur le vélo du cycliste posé sur un home-trainer.
Ces études ont une réputation mitigée auprès des cyclistes, car certaines discussions que j’ai pu lire sur des forums reprochaient à ces méthodes un manque de contact humain (la machine indiquerait des côtes (mesures) qui sont directement reportées sur le vélo sans prendre en compte le cycliste).
On retrouve également des « fitteurs artisanaux » qui ne sont pas forcément équipés d’autant de technologie mais avec de l’expérience qui peuvent trouver une bonne position.
Mais nombreux sont ceux qui pensent que cela ne sert à rien car on retrouve de nombreuses sources indiquant les mesures théoriques idéales à adopter. Par exemple :
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- Hauteur de selle = longueur de l’entrejambe * 0.88
- Avancement de la selle qui positionne l’avant du genou au niveau de l’axe des pédales lorsque les manivelles sont à l’horizontale.
- Taille du cadre de vélo = longueur de l’entrejambe * 0,66
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Cela pourrait donc se faire à l’instinct en modifiant la position petit à petit au fur et à mesure à partir de ces indications.
Mais quel est l’intérêt de faire une étude posturale si l’on trouve les côtes à reporter sur internet?
Pourquoi faire une étude posturale?
La pratique correcte du vélo est complexe, car elle sollicite de nombreuses parties de l’anatomie (articulations et groupes musculaires). Il n’y a pas que les jambes qui travaillent, contrairement aux idées reçues.
Même si c’est une pratique sportive dite « portée » qui génère moins de chocs et de traumatismes que la course à pied par exemple, la quantité de mouvement (chaque coup de pédales simplifié par une rotation à 360° des manivelles : la cadence) qui représente plusieurs milliers de répétitions par heure devient problématique en cas de mauvaise position sur le vélo.
Trois points de contact principaux et des périphériques associés
Bien que ce sont les jambes en rotation qui permettent d’avancer, tout cycliste a 3 points de contact avec sa machine, quels que soient son niveau de pratique et son équipement.
Les pieds
Point de contact le plus important, ils mobilisent tout le bas du corps pour le mouvement des métatarses aux hanches en passant par les genoux. Le genou est le point le plus sensible et la zone qui concentre la plupart des maux à vélo.
La position est d’autant plus importante pour les cyclistes équipés de pédales automatiques. Malgré la liberté angulaire possible sur la plupart des cales, les pieds sont verrouillés et le bas du corps est contraint par les réglages des cales sur les chaussures.
La selle
Un autre point important, car on passe très facilement des heures assis dessus.
Au-delà des réglages de la selle sur le vélo (recul, inclinaison), le choix d’une selle est très important.
La forme, la largeur, la longueur, évidée au centre ou pas, les différents niveaux de rembourrage, le poids sont de nombreuses caractéristiques qui ne doivent pas être pris à la légère.
La souplesse du cycliste rentre en compte dans le choix de la forme de selle. comme on peut le voir sur cette capture du sélecteur de Selle de la marque Shimano mais aussi le sexe car on trouve aujourd’hui des selles adaptées à la morphologie féminines avec des technologies spécifiques.
La selle la plus adaptée n’est pas toujours celle que l’on pense et le rembourrage n’est pas synonyme de confort. Souvent les critères de sélections s’arrêtent à l’esthétique, le niveau de performance ou de confort perçu, ainsi que le poids.
Une selle non adaptée peut entrainer engourdissement et douleurs. Ceux-ci peuvent provoquer des pathologies plus ou moins graves sur le long terme.
Le cintre et/ou poste de pilotage
Le cintre (guidon) du vélo ou plus précisément le poste de pilotage.
Ce dernier point de contact peut paraitre moins important du fait de sa relative immobilité, mais il conditionne la position globale du cycliste.
L’inclinaison du buste conditionne également le mouvement du bas du corps.
Une position plus basse et allongée sera plus aérodynamique. Mais peut entraver les mouvements des jambes si la position est trop extrême.
Mais elle requiert un niveau de souplesse et de musculation du tronc et du cou plus important.. Il faut donc trouver un juste milieu entre performance et confort afin que l’effort puisse être maintenu.
Une largeur du cintre insuffisante peut compresser la cage thoracique, créer de l’inconfort et influer sur la respiration. Même si de nombreux cyclistes professionnels utilisent des cintres moins larges pour « frotter » et se faufiler dans le peloton.
Les autres caractéristiques principales sont également importantes.
Le « Drop » : la hauteur entre le dessus du cintre et la partie basse au niveau des embouts. Le « Reach » qui est la profondeur du cintre à partir de la connexion avec la potence jusqu’à la partie la plus en avant du vélo.
La démocratisation relative des postes de pilotage intégrés où la potence et le cintre forment un seul bloc complique le choix. Ils sont plus aérodynamiques, mais limitent les possibilités de modifications de la position du poste de pilotage au réglage de la hauteur.
La longueur de la potence et son inclinaison sont à prendre en compte dans la posture globale également.
La taille du vélo
Ce qui est plutôt la taille du cadre du vélo qui est la composante principale et la base qui détermine les possibilités et limites de modifications de la posture. Sa taille, mais aussi sa géométrie sont les points les plus importants à considérer dans le choix d’un vélo. Et cela bien avant les autres équipements et périphériques. D’autant plus que le cadre est souvent l’élément le plus coûteux du vélo.
En règle générale, la taille recommandée d’un vélo est liée à la taille du cycliste qui prend en compte une moyenne des caractéristiques morphologiques d’une plage de taille (longueur d’entrejambe notamment).
Ces recommandations conviennent à une image normée de la morphologie mais nous avons tous des petites particularités physiques qui sortent des plages générales puisque nous ne sommes pas fait d’un moule contrairement à nos vélo (et heureusement).
Mais dans les particuliers, une mauvaise taille de vélo pourra vous contraindre à en acheter un autre si les ajustements nécessaires ne sont pas possibles. La taille de l’entrejambe (EJ) est un élément à prendre en compte mais le rapport Taille/EJ d’un cycliste peut ne pas être cohérent avec la taille du cycliste tel que conçue par les fabricants.
Face à la multitude d’éléments à prendre en compte, et malgré les nombreux contenus qualitatifs présents dans les magazines et sur internet, dans les guides d’achats et les conseils de vélocistes lors de l’achat ; le positionnement sur un vélo est un métier et une spécialité à part.
Le coût d’une étude posturale
Le coût d’une étude posturale varie en fonction du système choisi et de la prestation. On retrouve un large panel de possibilités allant de la posture simple à l’analyse du mouvement dynamique, une analyse aérodynamique, etc.
À cela peut s’ajouter des options telles que le positionnement des cales, le positionnement pour les contre la montre (CLM) si l’on possède plusieurs vélos, la fabrication de semelles orthopédiques pour certains centres.
Par ailleurs, il faut faire très attention à certaines semelles « grand public » qui se veulent correctrices en vente libre. Avec des boutons métatarsien plus ou moins importants censés améliorer la circulation sanguine, elles peuvent provoquer des pathologies dans certains cas.
Le mieux étant d’utiliser une semelle neutre ou de se rapprocher d’un professionnel si une correction est nécessaire
La fourchette de prix varie de 50€ à plus de 400€.
Je ne pourrais pas dire si les études les plus coûteuses sont les meilleures (je n’ai fait que deux études posturales), mais certaines semblent plus complètes que d’autres et affichent un niveau de précision ressenti plus élevé.
Le choix dépend bien évidemment des besoins et du niveau de pratique. Un coursier n’ayant pas les mêmes besoins et contraintes qu’un randonneur ou un cyclo-sportif occasionnel.
Mon expérience avec les études posturales
J’ai commencé la pratique du cyclosport assez tard (à 20 ans) et je n’ai presque pas fait de vélo enfant. J’ai appris à environ 10 ans à monter sur un vélo et je n’en ai pas refait par la suite.
Mon premier vélo était un vélo de route en aluminium (Un trek 1.5 de 2011/2) plutôt destiné à la pratique très occasionnelle. Le vélociste qui l’a vendu à fait un réglage basique qui m’a permis de commencer à rouler en faisant de petites sorties sans problème.
Par la suite, j’ai intégré la section compétition d’un club (sans participer à des compétitions). Le volume d’entrainement a considérablement augmenté en mettant le vélo à rude épreuve et mon niveau d’équipement a aussi évolué (passage des cale-pieds aux pédales automatiques notamment).
Les premières douleurs sont alors apparues. À l’époque, je ne savais pas que les études posturales existaient. Mon entourage « vélo » à fait de son mieux pour améliorer ma position, mais les douleurs persistaient plus ou moins et je continuais à rouler malgré tout.
L’année suivante, malgré les ajustements, des douleurs aux genoux et au dos m’accompagnaient assez régulièrement. Le vélo, pas du tout adapté au volume de pratique, commençait à montrer des signes de fatigue. J’ai donc décidé de changer de vélo suite aux conseils d’un ami cycliste et j’ai eu mon premier vélo en carbone (Un Haibike Affair SL millésime 2013).
Un changement de monde et j’ai pu rouler avec beaucoup de plaisir et sans douleur pendant des mois. Par la suite, la poursuite de mes études m’a fait arrêter le vélo quelques années (départ dans une autre région sans mon vélo).
Lorsque j’ai repris, les douleurs sont revenues, au point de me faire arrêter plusieurs semaines le temps que ça passe. J’ai donc cessé de rouler malgré l’envie. La perspective de douleurs importantes non liées à l’effort physique freine considérablement l’envie de faire du vélo.
Courant 2020, voulant reprendre de façon plus régulière le vélo, je l’ai changé en passant cette fois-ci par la case étude posturale après l’achat.
J’ai effectué une étude Rethül Fit, non sans une certaine appréhension, qui a modifié la hauteur de selle, le réglage des cales et le passage à un cintre de 44 cm de large (mais avec un « rise » de 25 mm). La selle convenait.
Contrairement aux échos que j’avais eus sur internet, l’étude posturale commence par un entretien avec le « fitteur » qui se préoccupe des antécédents et blessures, du niveau de pratique et de ce que l’on attend de l’étude posturale (confort ? Performance ?).
Ensuite vient la prise de mesures anatomiques au moyen d’outils précis (longueur d’entrejambe, largeur entre les deux os inférieurs du bassin (ischions) pour le choix de la largeur de la selle, soutien de la voute plantaire pour le choix de semelle plus adaptée)puis de l’évaluation de la souplesse et des limitations physiques avec des manipulations (flexions des jambes, amplitude des hanches, etc.). Toutes ces données sont prises en compte pour l’étude.
Seulement après l’entretien et la prise de mesures vient la pose des capteurs sur le corps et le report des côtes du vélo sur le vélo de fitting.
Les changements se font de façon dynamique sur le vélo et les résultats sont immédiatement visibles sur l’interface logiciel. J’ai pu tester différentes selles afin de trouver celle sur laquelle j’étais le mieux et mes cales ont été réglées. Dans mon cas, l’amélioration a été flagrante. Aussi bien les mesures du logiciel que mon ressenti personnel. Mes performances se sont instantanément améliorées. J’étais très mal posé sur le vélo.
Cela a été une révolution et je me suis demandé pourquoi je n’avais pas fait ça plus tôt. Cela m’aurait évité de nombreux maux. Bilan très positif de ma première étude posturale et j’ai profité du vélo durant + 1 an sans douleur.
Il faut compter 3 bonnes heures minimum pour une étude complète.
Après une année 2021 compliquée sur le plan personnel et sportif, j’ai décidé de changer de vélo et de passer au niveau supérieur pour l’étude posturale.
Le sujet est suffisamment dense pour nécessiter un article (et trop long) alors j’évoquerai cela très prochainement. Une expérience très intéressante, mais lourde de conséquences pour moi.
L’étude posturale est l’un des seuls investissements indispensables dans la pratique du vélo
Comme évoqué précédemment, le coût élevé relatif est à mettre en perspective avec les différents investissements/dépenses que nous cyclistes faisons chaque année par nécessité ou pour se faire plaisir.
Le rapport dépense/performance supplémentaire peut être bien plus intéressant que l’achat de roues plus performantes (€€€€), les tenues aérodynamiques (€€€) ou le dernier casque aérodynamique (€€) qui permet d’économiser x watts/h sur un chrono à 45 km/h. Au-delà du plaisir que l’on peut en retirer bien entendu.
À quoi bon acheter un capteur de puissance ultra-précis et assez cher (il faut compter + 500 € généralement) pour s’entrainer si la position de base n’est pas correcte ?
En effet, une meilleure position permet d’améliorer significativement la performance globale : on peut développer plus de puissance en optimisant la position et économiser de l’énergie directement avec un meilleur confort peut permettre d’appuyer plus fort/plus longtemps.
Plus de confort = Plus de plaisir = Plus de vélo ==> C’est un cercle vertueux.
L’étude posturale n’est donc pas seulement réservée aux coursiers et professionnels.
Il faut toujours écouter son corps et les douleurs.
Globalement il n’y a pas de douleurs « normales » quand on sort du spectre des douleurs musculaires (raisonnables et limitées dans le temps) dû à l’intensité de certaines sorties.
Toutes douleurs articulaires, gênes et inconforts doivent être pris au sérieux. Au risque de favoriser la survenue de pathologie qui peuvent être irréversibles pouvant pénaliser non seulement la pratique du vélo, mais du sport en général
Conclusion
L’étude posturale représente pour moi un investissement personnel important et bénéfique sur le long . les effets bénéfiques sont immédiatement perceptible après parfois un petit temps d’adaptation (dans mon cas je n’en ai pas eu besoin).
Même s’il est recommandé de refaire une étude posturale en cas de nouvel équipement modifiant la position ou le vélo. En réalité une fois qu’une bonne position est trouvée et que l’on connait les réglages des différents périphériques, on est armé pour évoluer avec sa machine en limitant le risque de maux et de blessures. Le rapport d’une étude posturale contient les côtes à reporter.
Dans le meilleur des cas, l’étude posturale confirme que l’on a une assez bonne position sans changement de vélo ou de périphérique(s) nécessaire tout en l’améliorant. Dans les cas les moins favorables, cela donne un objectif à plus ou moins long terme qui peut permettre d’améliorer sa pratique, supprimer des douleurs qui freinent et permettre la guérison de blessures. Cela permet aussi d’améliorer ses performances de manières significatives (même sans objectif de compétitions).
2 réponses sur “L’étude posturale : pour qui? Pourquoi? Comment?”